Le 22 décembre 1951
est une mauvaise journée. Vers 10 heures du matin, Torricelli (PC du GATac Nord à Hanoi) est en
émoi. Le lieutenant Repelin,
un jeune observateur de "Criquet"
qui survole la
rivière Noire au nord de Hoa-binh, annonce de mauvaises
nouvelles. Il est chargé, avec son pilote, l’adjudant-chef Bazin, un « moustachu
», de
protéger un convoi fluvial composé de quatre petits LCVP et d’un LCM légèrement cuirassé,
qui remonte de Hoa-binh sur Hung-hoa.
Les eaux de la rivière Noire
sont encore basses et
il faut suivre un chenal fort
étroit qui, au sud de Tu-vu, passe à
toucher la rive gauche - la rive viêt - par suite de la présence d’un grand banc de sable au milieu du fleuve. Les Viêts ont rapidement repéré la manœuvre obligatoire de nos bateaux et ils ont amené sur la
rive, très bien camouflés dans les
arbres et les herbes, plusieurs bazookas et de nombreuses
mitrailleuses. Il ne leur reste plus qu’à attendre leur
proie.
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Aussi, le 22 décembre, Torricelli entend-il
Repelin hurler
dans ses écouteurs: «Les Viêts bazookent le convoi, envoyez immédiatement
la chasse ». Une
patrouille en l’air est rapidement détournée vers
Tu-vu avec mission de faire taire les
bazookas. L’artillerie du Rocher Notre-Dame se met elle aussi en
action. Mais le drame a été
court, des cinq bateaux touchés à mort, trois coulent très
vite, tandis que les deux
autres réussissent à s’échouer
sur le banc de sable, où les survivants débarquent, puis se jettent à
l’eau pour rallier la rive droite, tandis que
les mitrailleuses viêts les
poursuivent de leurs tirs. Très rapidement, le "Criquet" s’aperçoit
qu’il y a sur le banc de sable des blessés incapables de rallier seuls la
rive amie. il demande immédiatement un
hélicoptère. Mais se poser sans défense
au milieu du fleuve, à portée des rafales ennemies, est une
mission de sacrifice. Nous ne disposons alors
que de deux hélicoptères, qui sont
terriblement précieux, mais il est impossible de ne pas tenter
de sauver nos camarades. Nous
décidons d’envoyer le capitaine
Santini, l’as des pilotes de«
ventilateur », accompagné d’une patrouille de chasse chargée de le protéger. Nous
demandons en même temps à l’artillerie d’arroser
la rive ennemie.
Santini
effectue alors une des plus
dangereuses missions de
sa splendide carrière. Dès qu’il apparaît, en rase-mottes
an-dessus de la rivière
Noire, il est salué par des
rafales de mitrailleuses qui viennent, semble-t-il,
de partout à la fois. La chasse, qui mitraille systématiquement
la rive, ne voit rien et
les Viêts bien camouflés continuent à tirer. Cependant, Santini n'hésite pas. Il se pose sur le banc de sable, descend de son
engin et part en
courant chercher les deux blessés, incapables de se mouvoir,
qu’un pli léger de terrain a protégé
des balles ennemies. il lui faut atteindre le premier blessé, le
prendre sur son dos, l’amener à près de deux cents mètres -
parcourus sous le feu - jusqu’à
son Hiller 360, l’installer dans un des brancards et recommencer pour le deuxième. Par un véritable
miracle, il n’est pas touché
et peut re-décoller sans dommage,
aux applaudissements de
la garnison du Rocher
Notre-Dame et des marins indemnes qui ont
pu s’y réfugier.
La mission paraît terminée et
la chasse part à
d’autres rendez-vous. Mais Santini, en amenant ses
blessés à l'hôpital Lanessan, à Hanoï, apprend par un
"Criquet" qu’il y a encore un blessé à ramasser sur le sable. il n’hésite pas à
enfreindre les ordres
qui lui ont interdit de
travailler sans protection
de chasse, repart tranquillement et, avec
la même maîtrise - la même chance - sauve
son troisième blessé.
Photographies du Service Historique de la
Défense |
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