BEDO - TCHAD
11
/ 12 octobre 1970
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Le combat de Bedo au Tchad (BET) le 11
octobre 1970
Mission de la 6ème CPIMa en cours:
Contrôle de la ligne des palmeraies s'étendant entre 50 et
120 kms au N.O. de Faya-Largeau, capitale du BET.
Composition de l'unité: Le Cne
Canal commandant l'unité dispose de 3 commandos
(1,2,4),
commandés par les lieutenants Neau,
Beaufils et Raffenne. L'Adj
Jadoule est à la tête de la section de commandement
et d'appui, articulée en un élément de santé avec le Médecin
Capitaine Marini, une pièce de 57 sans recul
prêtée par l'armée tchadienne et un groupe de mortiers
de 81 sous la houlette de l'Adj Chan. Toute
l'unité est motorisée sur Dodge 6x6.
Cette opération n'ayant pas permis de
contact sérieux et la logistique imposant un ravitaillement,
le Capitaine décide le retour sur la base arrière,
Largeau.
Le dimanche 11 octobre 1970, l'unité est
sur la route du retour. Elle quitte la palmeraie de
Bedo vers 15H00 en direction de celle de
Kirdimi, distante de 50km en roulant en convoi.
L'articulation de la colonne est constituée comme suit : en
tête, le commando "Neau", suivi du Capitaine
accompagné de sa section de commandement et d'appui;
derrière vient le commando "Beaufils" et
enfin un peu décroché le commando "Raffenne" ferme la
marche. Au total, 15 véhicules roulent espacés à distance de
poussière avec à leur bord, des parachutistes aguerris et
rompus aux embûches de ce terrain désertique. Rien ne
laisse prévoir une embuscade.
A peu près à mi-chemin entre
Bedo et
Kirdimi,
vers 16h30, le véhicule de tête
du Ltt Neau est pris à partie par des rebelles cachés
dans les rochers bordant la piste, à moins de 10 mètres et
dans un endroit qui n'avait rien d'un "coupe-gorge".
Dès le premier coup de fusil, presque toute la colonne est prise
sous le feu. Les rebelles, bien abrités et étalés
sur une longueur de plus d'un kilomètre ont laissé entrer le convoi dans une nasse meurtrière.
En outre ils ont posté
des hommes de chaque côté de la petite cuvette de sable dans
laquelle la compagnie se trouve bloquée. Le
feu est d'emblée très nourri. Les rebelles au nombre d'environ 130,
armés de fusils "Enfield" à balles expansives, et de
carabines italiennes "Stati" ayant tous sur eux
une dotation en munitions au moins
égale à celle de la compagnie et bénéficiant de l'appui de trois
armes automatiques "FM Brenn" ajustent leurs tirs. Les
pertes chez les parachutistes, et en particulier au sein du
commando de tête, sont de suite sévères. La quasi-totalité
de l'unité est clouée au sol en se faisant tirer comme des
lapins. Par trois fois les rebelles essaient de s'emparer du
véhicule de tête et sont repoussés à la grenade. Cependant
quelques hommes parviennent à s'abriter derrière les
premiers rochers. Afin de se dégager, le Sergent-chef Voronine
tente un assaut désespéré, à la tête de son groupe.
Dans son élan, il est tué d'une balle en plein cœur. Seul le
"4" ne fut pas pris dans la nasse au déclenchement de
l'embuscade. Le Ltt Rafenne, entendant
les comptes-rendus radio, fait débarquer ses hommes à
défilement, au plus près, et entame à pied un débordement dans le
dos de l'adversaire, ce qui va permettre, en premier lieu,
de dégager le commando "Beaufils" lequel
s'oriente immédiatement dans les rochers pour progresser
vers la tête du convoi. |
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Le 4ème commando continue son avance malgré 4
blessés et arrive à la hauteur des véhicules de tête
de la colonne, coupant ainsi la retraite des
rebelles. L'Adj Jadoule
peut alors entamer sa progression finale avec un appui au 57
sans recul. Tenu informé de l'évolution des opérations par
le Cne Canal, le SC Tremauville resté à son poste, appelle
à la radio Largeau, où stationne, à moins d'une demi-heure de vol, une
patrouille de chasseurs AD4 "Skyraider" de l'ELAA 01/44
détachés de la base aérienne 172 Fort-Lamy, il est
blessé et remplacé par le Sgt Poupeau
qui ne parvient pas plus à joindre
la station radio de Largeau s'obstine à passer
des messages de routine déclarant que ce n'est pas
l'heure de la vacation... |
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Finalement, à la
tombée de la nuit, vers 18H30, après
trois assauts successifs, le commando "Raffenne" réussit à
dégager le Ltt Neau, seul survivant du véhicule de
tête, à mettre en fuite les derniers rebelles et à mettre en
œuvre la relève du 1er commando. A la nuit tombante, c'est
l'heure du bilan. Pour les "Paras" il est très lourd : 11
morts, un douzième le CC Thomas décédera en
cours d'évacuation sanitaire, 25 autres furent blessés, dont le Cne
Canal
et le Ltt Neau. L'ambiance de cette nuit qui
commence est pesante. Tandis que le médecin et les
infirmiers s'affairent autour des blessés, le Capitaine
s'attache à remettre de l'ordre dans sa "boutique", en ayant
comme souci essentiel l'éventualité d'un retour offensif de
l'adversaire. |
Les véhicules ont durement souffert. Les mécaniciens
s'affairent toute la nuit afin de parer au plus urgent.
Mais bientôt, nous sentons que nous ne sommes plus tout à
fait seuls. La voix du Cdt Dominique, ancien
commandant de la CPIMa et chef de l'Etat-major
Franco-Tchadien nous réconforte à la radio. Puis le
ronronnement d'un bon vieux Nord Atlas
2501 du GMT 00.59 se fait entendre, il tournera toute la
nuit au-dessus de nous en larguant régulièrement ses lucioles,
aux commandes, un copain aviateur le Ltt Lalloz.
Mais l'état de certains blessés est quasi désespéré,
il faut les évacuer d'urgence si on veut avoir une chance de les sauver.
Le SLT Koszela, au manche de
son Alouette II, seul hélicoptère disponible à la base
avancée de Largeau, accompagné du Cne Nefiolov
commandant de l'escadrille de chasse faisant office de
navigateur, exécuta 3 rotations, en dépit du vent de sable
qui se levait et des risques de pilotage de nuit, pour
sauver les blessés.
Au lever du jour, les rebelles ne se
manifestèrent pas. Nous entreprenons la
fouille des lieux du combat pendant que les
mécaniciens continuent à rafistoler tant
bien que mal les véhicules criblés d'impacts
afin de continuer la route vers Kirdimi où une colonne de secours
devait être présente. Chez l'adversaire les pertes sont
encore plus
lourdes puisqu'il y eut 60 tués. Bilan avéré sur des renseignements de prisonniers, par la découverte de tombes et
de la trentaine de cadavres abandonnés sur le terrain. Une
quinzaine d'armes appartenant aux rebelles sont ramenées à
Largeau, ainsi qu'un drapeau du FROLINAT
(Front de libération national) trouvé sur le
corps d'un rebelle par le parachutiste
Platel du "4" et qui est exposé
à l'Ecole des Troupes
Aéroportées (E.T.A.P.) de Pau. |
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Récit du Général Raffenne |
Evacuations sanitaires
des 11
et 12 octobre 1970
"Le
Dimanche 11 Octobre 1970 sur la Base de Faya-Largeau
l'après midi s'était passée tranquillement a jouer à la
pétanque entre l'Aviation et l'Infanterie de Marine à
l'ombre des rares palmiers.
A dix huit heures, la nuit venant de tomber, nous étions
tous au bar... Le premier verre à peine levé c'est l'alerte
ou plutôt l'annonce de l'embuscade, rien de bien précis
sinon qu'il y a du dégât; des bribes de messages..."
(*)
Le Cdt Dominique, chef de l'EMFT vient de
recevoir par radio des informations de la compagnie du Cne
Canal tombée dans une embuscade à 20 km au SO
de la palmeraie de Bedo, sur la piste menant à la
palmeraie de Kirdimi.
---------------------------------------------------------------------------------------- Mission du détachement d'hélicoptères
légers: Procéder à l'évacuation sanitaire des hommes
grièvement blessés. Composition de l'unité:
Pilote SLT B.Koszela de l'escadron EH 3/67
"Parisis", Mécanicien SC Le Bourhis.
Hélicoptère Alouette II SE 3180 n° 001
Immédiatement, je me trouve confronté aux contraintes du
règlement du BSV interdisant le décollage de nuit avec un
seul pilote en milieu inhospitalier et de surcroît avec un
aéronef non conforme pour le vol de nuit. Le Cdt
Dominique me fait comprendre que cette EVASAN est
impérative et qu'il interviendra auprès de ma hiérarchie
AIR. Le Cne Nefiolov , commandant l'escadrille
AD4 "Skyraider" en détachement, se propose pour me servir de
navigateur; je suis réconforté, ainsi je ne serai pas seul
dans l'Alouette II car, venant de prendre mon détachement le
7 octobre, je n'ai effectué qu'un seul vol de reconnaissance
de 15 mn depuis mon arrivée. Aussitôt,
le mécanicien met l'appareil en œuvre: plein complet 560 l ,
ce qui correspond pour ce type de mission à une autonomie de
4h30 environ, montage des deux civières extérieures.
Les conditions météorologiques en début de nuit sont bonnes,
clair de lune, ciel dégagé sans vent de sable.
La distance du lieu de l'accrochage, 1 heure par le
cheminement de sécurité en suivant la piste ou 35 mn au cap
direct, me donne de la marge pour une éventuelle recherche
de la CPIMa. Par mesure de sécurité je décide
de suivre la piste Faya-Largeau / Elleboye / Aïn Galakka
/ Kirdimi / Bedo. |
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I----------I
= 10 km = environ 5 mn Alouette II |
Le décollage a lieu à 21h30. Malgré un ciel dégagé et
une altitude de vol à 500 pieds la
visibilité verticale ne permet pas de bien distinguer le
sol; ce sera donc le cap et la montre. La HF est branchée et
le contact avec la CPIMa a lieu après 30 mn de vol entre
Téléré et Aïn Galakka. Le balisage de la DZ sera
assuré par les phares de deux camions. |
A partir de cet instant je coupe les feux extérieurs afin
d'éviter d'être la cible de tireurs éventuels. Une fois sur
l'axe d'approche je commence la descente au cap de la
branche, environ au 40°. Aussitôt posé, le rotor est arrêté
mais turbine non coupée par précaution. |
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Zone de l'embuscade et de la DZ |
Le médecin capitaine Marini m'informe que
13 blessés doivent être évacués par air et que les plus plus
graves partiront avec la première rotation, 2 dans les
civières et 1 assis à l'arrière. Je calcule rapidement le
devis de poids pour le décollage: 1740 kg soit... 140 kg de
surcharge. En stationnaire le pas indique14°5. L'axe est
dégagé et le vent fort, 25 à 30 Kts. Après l'enfoncement au
décollage, la vitesse de 60 Kts est affichée et le vario
positif mais faible. Virage à droite à 500 pieds. Pendant un
court instant j'opte pour le retour au cap direct, le vent
de sable s'est levé j'abandonne donc cette idée et reprends
le chemin inverse pour impératif de sécurité en cas de poser
d'urgence l'accès sera plus facile si une récupération
terrestre des blessés est envisagée.
Sans point de repère, il me faut contacter Faya.
La montée est laborieuse jusqu'à 1500 pieds. Après 30 mn de
vol, le contact VHF est établi; je demande au contrôleur de
tirer des fusées éclairantes pour me guider, aussitôt les
fusées en visuel, je suis rassuré, le stress de la
navigation disparaît et je suis enfin décrispé. La première
rotation s'achève.
"Pendant ce temps des coups de
feu ont éclaté a proximité de Faya-Largeau. Diversion
? Nous avons appris le lendemain que l'Armée Tchadienne
avait accroché des rebelles qui attaquaient la prison de
Faya. Au petit matin il ne restait que la prison vide et
l'Armée Tchadienne.
Dès le premier retour de l'Alouette je donnais mon MAC 50 à
la convoyeuse de l'Air afin qu'elle assure si nécessaire sa
sécurité pendant les navettes entre la Base et l'hôpital de
Faya pour y emmener les blessés.
Le Noratlas lui aussi a décollé pour un largage lucioles
avec pour pilote le lieutenant Lalloz. Juste avant
d'embarquer le mécano m'a prêté sa 22 LR personnelle pour
remplacer provisoirement mon MAC 50.
Le festival continuant autour de la prison, nous nous sommes
organisés sous le commandement du commandant Pourchet,
ancien d'Indo et pilote de chasse, qualification qui lui
permettait de voler sur AD 4 en tant qu'abonné vu qu'il
était chef des Opérations sur la Base de Fort-Lamy.
C'est ainsi que nous avons monté la garde au milieu des fûts
d'essence. L'armement individuel se trouvant à bord du
Noratlas, le commandant Pourchet a distribué des
barres de lits métalliques à la troupe en leur disant qu'en
cas de nécessité il fallait leur foncer dedans en criant....
Il n'y a pas eu besoin de tout cela !" (*)
La deuxième rotation aura lieu vers minuit. La navigation
sera facilitée par le largage de lucioles du Nord Atlas.
Retour avec 3 blessés Merci Lieutenant Lalloz.
et Lt Malphettes Pilotes du
N2501 n°171.
"Nous étions quatre pilotes d' AD 4 ce
jour là à Faya-Largeau : Le Cdt Pourchet, le
Cne Néfiolov commandant l'Escadrille 1 / 22 des AD 4,
l'A/C Corre "Pablo" le plus connu de tous et
moi même.
Il fut décidé qu'étant de garde je me reposerais et que ce
serait le Cdt Pourchet et le Cne Néfiolov qui
feraient le premier vol
A 3 heures 1/2 au moment de leur réveil il en fut autrement
: Adjt Lourdais vous faites le vol avec Pablo.
Quatre heures du matin petit déjeuner puis décollage de nuit
pour arriver sur zone au lever du jour.
Une fois à la verticale du lieu de
l'embuscade à chaque contact radio HF avec la C P I M A,
nous étions interférés par une nana qui gambergeait en
Russe. Malgré tout, les troupes au sol étaient réconfortées
de nous avoir à leur verticale en remplacement du Noratlas.
Par contre aucune trace des rebelles qui étaient partis
depuis longtemps." (*)
Troisième rotation, décollage à 5h45 le 12 octobre avec 4
blessés à bord au retour.
Quatrième rotation, décollage à 9h00 avec 3 blessés au
retour.
Au total, 2 rotations de nuit, 4h05 de vol et 6 blessés
et 2 rotations de jour, 4h20 de vol et 7 blessés.
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ci-dessus le SC Mécanicien
Le Bourhis
à gauche le SLT Pilote
Koszela |
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Cne Néfiolov |
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Commandant l'escadrille de "Skyraider" |
Adj Lourdais |
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sans oublier la convoyeuse Miss
Wiuart Marie-Thérèse qui accueillait les blessés à
Faya-Largeau. |
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Récit de Bernard
Koszela; (*) Récit
parallèle de l'Adjudant Michel Lourdais |
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