Jean PELLEREAU

Président de l'AHA 

CÉRÉMONIE COMMÉMORATIVE DU 15 MAI 2013 

ALLOCUTION A LA STELE

 Notre assemblée se réunit aujourd'hui au cimetière de Neufchâtel en Saosnois, pour commémorer le cinquantième anniversaire de l'accident aérien survenu le 25 mars 1963 où trois de nos camarades disparaissaient : Les lieutenants pilotes Jean Varlot et André Georges et l'adjudant Paul Lapertot mécanicien. 

Ce cinquantenaire est également marqué par le transfert de la stèle depuis la forêt de Perseigne, où nous nous retrouvions jusqu'à présent pour honorer la mémoire de nos amis disparus. 

Je vous propose de suivre le récit de ce tragique évènement. 

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Fin mars 1963, des manœuvres aéroterrestres sont organisées dans le Morbihan. Le détachement permanent d'hélicoptères 4/23 de Villacoublay appartenant à la 23ème Escadre d'hélicoptères de Saint-Dizier est chargé de mettre en place à Saint-Cyr-Coëtquidan une formation de 4 hélicoptères H.34 et d'une Alouette II. 

Les quatre hélicoptères de transport de troupes suivis ultérieurement par l'appareil de liaison, décollent de Villacoublay en milieu d'après midi. Les conditions météorologiques sont mauvaises, il bruine et le ciel est couvert de nuages bas qui accrochent par endroit le sommet des collines. La patrouille adopte une formation de route à basse altitude en direction de la Bretagne. 

Ce 25 mars 1963 à 16h20, en abordant la forêt de Perseigne, l'appareil leader de la formation se fait surprendre par les nuages qui descendent jusqu'au sol et qui recouvrent le sommet des arbres. L'hélicoptère entre dans cette écume opaque et se met en position inusuelle avant que son vol ne puisse être stabilisé. 

Perdant le visuel avec leur leader, les autres appareils réussissent à effectuer un "quick-stop" juste avant d'atteindre la barrière nuageuse. Sans jamais perdre le sol de vue, ils reprennent une prudente progression et se posent à l'orée de la forêt près de Neufchâtel en Saosnois. 

C'est en essayant de contacter la gendarmerie que les équipages des trois hélicoptères apprendront l'accident de l'appareil leader. L'équipage de l'Alouette II ne sera informé du drame qu'à son arrivée à Coëtquidan. 

L'enquête révèlera plus tard le détail des circonstances qui ont conduit à cette épouvantable issue. Notamment grâce au témoignage de l'unique survivant de la catastrophe. 

A l'intérieur du cargo, les deux mécaniciens, Yves Douarin et Paul Lapertot  voient le drame arriver. En voulant éviter de se crasher avec l'appareil, ils tenteront, grâce à une initiative aussi audacieuse que désespérée, d'évacuer "le cargo" en sautant au sol avant l'impact. 

L'appareil s'écrase au sol et prend feu instantanément. Trois des quatre membres d'équipage trouvent la mort, le lieutenant pilote Jean Varlot, commandant de bord, le lieutenant pilote André Georges et l'adjudant Paul Lapertot, mécanicien radio. Seul Yves Douarin, bien que très grièvement brûlé et blessé survivra à l'accident. 

Ce dernier connaît de long mois de soins intensifs à l'hôpital avant de pouvoir reprendre une vie à peu près normale. L'accident lui laisse des séquelles importantes. Malgré ses meurtrissures, il participe en mars 2003 à la cérémonie de commémoration du quarantième anniversaire de la tragédie qui emporta ses camarades d'équipage. 

Il y a une semaine à peine, le 8 mai dernier exactement, Yves Douarin nous a quitté. J’étais loin de m’imaginer qu' Yves Douarin réussirait à se joindre à nous aujourd’hui, à sa façon, de là-haut... Que son âme repose en paix, auprès de ses camarades d’équipage... 

Malgré le récent décès de son mari et son immense chagrin, madame Douarin avait exprimé le désir de participer à cette cérémonie. Malheureusement ses enfants nous ont informé qu'elle avait été victime dimanche dernier, d'un léger malaise remettant en cause sa venue. Elle tient à s'en excuser. 

Cinquante années ont passé et tous les amis de Jean Varlot, d'André Georges, de Paul Lapertot et d’Yves Douarin se souviennent… 

Ce drame a touché profondément la famille et les proches de ces hommes qui sont tombés ou qui ont été blessés en accomplissant leur devoir. Ils aimaient leur métier et étaient fiers d'appartenir à l'Armée de l'Air. Le 25 mars 1963, ils ont rejoint les glorieux aviateurs qui ont donné leur vie dans l'accomplissement de leur mission. 

Il y a dix ans déjà, en mars 2003, l'Association des Anciens des Hélicoptères Air sous la présidence du Général Jacques Hervé a souhaité honorer la mémoire de nos trois disparus, en présence des autorités préfectorales, municipales et militaires. La stèle érigée au cœur de la forêt de Perseigne quelques temps après l'événement fit l'objet d'une attention particulière à cette occasion. Une première campagne de restauration lui fut dédiée et permit d'organiser une cérémonie du souvenir très digne sur les lieux mêmes de l'accident. 

Malheureusement le monument se situant au cœur de la forêt a subi les outrages d'un environnement hostile. Les mousses, feuilles mortes et autres moisissures ont contribué à dégrader son aspect général. Les agents de l'Office National des Forêts, la municipalité et les rares visiteurs sarthois qui côtoyaient la stèle nous ont alertés de la dégradation de son état. 

Après avoir été avisés de l'urgence de la nouvelle rénovation à effectuer et du nécessaire reconditionnement de la stèle, les dirigeants de l'association ont trouvé judicieux de lui trouver un lieu de repli afin qu'elle ne subisse plus jamais les outrages de la forêt.  

L'AHA s'est rapprochée de Neufchâtel en Saosnois, commune la plus proche du lieu de l'accident qui s'était déjà associée à notre action il y a dix ans. Après avoir recueilli les accords combinés de l'Armée de l'Air, du village de Neufchâtel en Saosnois et de l'Office National des forêts, l'association a décidé de faire déplacer la stèle vers un lieu où son état serait préservé de façon durable. 

Les relations privilégiées entretenues avec la municipalité de Neufchâtel en Saosnois nous ont permis de choisir son petit cimetière comme lieu de sauvegarde de la mémoire de nos camarades. Il accueillera désormais la stèle érigée au souvenir de nos trois amis tombés en accomplissant leur mission. 

A l'heure même où nous nous réunissons, des camarades en activité s'impliquent partout dans le monde pour la défense des intérêts de la France. Nos aviateurs sont simultanément et durablement engagés sur plus d'une quinzaine de théâtres d'opérations. Il est aujourd'hui essentiel pour eux que leur action soit soutenue par un indéfectible patriotisme des citoyens de la Nation à laquelle ils consentent l'ultime sacrifice. Pour que ce sacrifice ne soit pas vain, il doit être solennellement rappelé à notre souvenir. Cette promesse mémorielle, nous l'avions faite à l'époque à nos camarades défunts. Aujourd'hui, nous honorons simplement notre engagement. 

Aux parents et proches des victimes ici présents et en particulier aux enfants du lieutenant Georges et de l'adjudant Lapertot qui dans leur prime jeunesse ont perdu leur père, je voudrais rappeler combien cet accident nous a marqué. 

Je souhaite également que le transfert de la stèle dédiée à la mémoire des hommes que nous honorons aujourd'hui permette de porter à la connaissance des générations à venir les actions de nos glorieux ainés. 

Aux familles de Jean Varlot, d'André Georges, de Paul Lapertot et d'Yves Douarin, à leurs amis, aux adhérents de l'association présents, j'adresse un message plus personnel : nous n'oublierons pas le sacrifice de nos camarades. Il aura permis, au delà de l'amélioration des techniques opérationnelles, de nous retrouver pour cette simple cérémonie empreinte de notre amitié, de notre solidarité et de la fraternité qui unit nos frères d'Armes.