Panégyrique de Sophan Men

 

En tant que 20ième commandant du CIEH à avoir connu Mr Men, il me revient le terrible honneur de faire l’éloge de Sophan qui nous quittera le 15 juin pour une retraite bien méritée. Voici donc les étapes importantes de sa carrière. Sophan, tu me pardonneras les éventuels oublis, imprécisions, erreurs, en particulier sur certaines périodes de ta vie.

 

La première imprécision apparaît dès la naissance de Sophan. Quand es-tu né ? Le sais-tu toi-même ? Tu serais né à Takeo le 15 juin 1938, mais c’est probablement faux. D’autant plus que la tradition cambodgienne rajeunit volontairement les enfants pour leur permettre une scolarité plus grande. Alors… ! L’âge de Sophan restera donc un mystère.

 

Que fait-il après ? seule certitude : il grandit, et encore pas beaucoup diront les mauvaises langues. On le retrouve en juillet 1960 engagé comme pilote de l’Armée royale khmère. Avec le grade d’aspirant, il rejoint le 13 novembre 1960 la base de Cognac pour le stage pilote avion sur Morane 733 puis T6. Breveté pilote d’avion, macaronné par le Colonel Chantier, il rejoint Chambéry pour le stage pilote hélicoptère léger et lourd. Elève en particulier du Cdt Bartier dont nous avons honoré la mémoire lors du baptême des salles de cours, il est breveté pilote d’hélicoptères le 17 octobre 1963. A noter qu’il avait débuté les vols par un beau matin de juin, il les finira par un beau matin de juin 40 ans plus tard. Il a presque commencé sur T6 , pour finir sur AS 555N Fennec.

 

D’octobre 1963 à septembre 1966 il est pilote opérationnel sur la base aérienne 101 (déjà) de Pochentong. Il y sera nommé sous-lieutenant puis lieutenant, volant sur T 28, Fouga, et Alouette II.

 

Pourquoi est-il envoyé en stage météo en France, il ne le sait pas lui-même, d’autant moins qu’après les postes qu’il occupe comme officier logistique au 4ième bureau de l’état-major de l’armée de l’air khmère en 1967, puis au 3ième bureau (opérations) comme capitaine n’utilisent pas ses hautes compétences météorologiques. En 1969 il est affecté aux opérations de la base de Pochentong. C’est là que la guerre croise son chemin. Il rejoint l’état-major spécial du temps de guerre comme officier logistique. Entre 1970 et 72, il fera deux détachement d’un mois auprès de l’état-major air américain à Saïgon. En 1972 il retrouve encore une fois les opérations de la base de Pochentong. Il est commandant.

 

Le 11 novembre 1973, il signe son armistice personnel et part en permission en France, il n’en reviendra jamais, obtenant le statut de réfugié politique. Il travaillera pendant 2 ans et ½ comme livreur, preneur d’ordres, puis chef de magasin chez un grossiste en boissons. Je demande aux mauvaises langues de se taire.

 

Le 16 juillet 1976 il est embauché sur la base de Chambéry comme agent sous contrat affecté au CIEH. Bibliothécaire, prof de météo, secrétaire, surveillant d’examen, correcteur, homme à tout faire de la DIS du CIEH, il mettra pendant 27 ans toute son énergie au service de l’unité. Chacun garde un souvenir différent et complémentaire de Sophan.

 

On se souvient de ses cours de météo tropicale, de la repro à l’alcool et des brouillons que des commandos d’élèves allaient récupérer dans ses poubelles la veille des tests, de l’ordinateur MACINTOSH offert par le Col Marbach et compatible avec lui-même. On se souviendra des dossiers de CCS qu’il préparait, des briefings qu’il mettait en forme pour les commandants successifs du CIEH des commandes de matériel de bureau, la gestion de la bibliothèque hautement évolutive du CIEH, la frappe des livres qu’il devait ensuite reproduire et distribuer. Quel était l’intitulé précis de son poste ? Il faisait tant de choses qu’on a du mal à le cantonner dans le rôle de « bibliothécaire ».

 

Mon cher Sophan, je ne relirai pas tes notations annuelles, tellement élogieuses que tu en rougirais (quand je suis arrivé il y a 4 ans, il avait 19,5 / 20 ! ! ! !) je retiendrais plutôt tous les mots gentils qui furent prononcés ou écrits à ton sujet par tous ceux que nous avons contactés pour cette journée : « Un Monsieur », ta gentillesse, ta disponibilité, ta serviabilité, ta discrétion et ta pudeur, ton efficacité. Je laisserai le mot de la fin au Colonel Carpentier qui m’a dit « Ah Sophan ! ». Si je ne le savais pas si brillant j’aurais pu croire qu’il n’arrivait pas à trouver les mots suffisants pour exprimer son amitié pour Sophan. Non je crois plutôt que tout commentaire aurait affadi l’expression de la tendresse qu’il te porte, comme chacun de mes prédécesseurs et moi-même.

 

C’est donc avec beaucoup de joie que nous te voyons si bien entouré aujourd’hui. Ils sont nombreux ceux qui n’ont pas pu venir et qui ont tenu à s’associer par la pensée, une lettre ou un mail. Il me reste à te remettre en leur nom à tous le modeste cadeau traditionnel des partants du CIEH, la médaille du CIEH….