L'envol

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bien qu’ayant effectué la majeure partie de mes heures de vol sur H34, j’ai néanmoins réalisé mon dernier vol (26.12.72) aux commandes d’un aéronef à bord d’une Alouette II, au retour d’une mission, seul à bord, ce qui en a renforcé le souvenir. C’était mon dernier vol, mais quel a été le premier ?...

 

Quel fana d’aviation n’a pas un jour rêvé de voler à bord d’un des mythiques « War Birds » de la seconde guerre mondiale ? Et bien j’ai eu cette chance il y a de cela plus de soixante ans.

Parisien d’origine, j’ai connu à l’âge de trois ans l’« Exode » de triste mémoire, mais j’ai eu la chance, par la suite, de passer les années de guerre en Afrique du Nord, mon père, affecté au Service de Santé des Armées (après des « vacances » de quelques mois en « stalag »), étant muté en Algérie puis au Maroc, pour finir à l’Hôpital de Fez.

C’est là que j’ai commencé à m’intéresser à l’aviation, car ma mère s’occupait à l’époque d’une bibliothèque militaire. Mon goût pour l’aéronautique a commencé là en feuilletant les magazines de l’époque, dont la guerre était évidemment le sujet principal avec photos à l’appui et particulièrement sur les avions du conflit.

J’ai également le souvenir marqué du passage à basse altitude d’un P38 « Lightning », très nombreux à l’époque, que nous surnommions le « double-queues » de par sa configuration particulière, ainsi que le survol d’un dirigeable à faible altitude qui, pour un gamin de six ans paraissait envahir tout le ciel.


 

Bref, j’avais déjà un penchant certain pour les choses de l’air qui allait s’amplifier dans les circonstances exceptionnelles et inattendues qui vont présider à mon baptême de l’air.

 

En Août 1945, les autorités américaines offrirent leurs services afin de rapatrier en France, par la voie des airs, les familles de militaires stationnées en Afrique du Nord, les moyens de transport civils étant alors très limités, pour ne pas dire inexistants.
 

C’est ainsi qu’un beau matin, nous nous retrouvâmes, ma mère et moi, sur le terrain de Port Lyautey (maintenant Kenitra) afin de prendre place à bord d’un… Boeing B17 plus connu sous l’appellation de « Forteresse Volante », destiné à nous faire traverser la Méditerranée jusqu’à Marseille.

 

Il va sans dire que pour moi, qui avait souvent vu ce célèbre bombardier en photo sur les magazines, c’était vraiment une aventure extraordinaire, d’autant plus que, ma mère parlant couramment l’anglais, on nous installa par dérogation dans le nez vitré de l’appareil en compagnie d’un membre d’équipage (bombardier ou navigateur ?)...

... Alors que les autres passagers devaient se contenter du fuselage (les pauvres…).

Ainsi idéalement placé, je me souviens très précisément de ces B17 se suivant à la « queue leu leu » sur le taxiway avant de pénétrer sur la piste pour le décollage, dans le déchainement des quatre moteurs à pleine puissance.

Mais quels merveilleux souvenirs, pour un gamin de moins de huit ans, que la vision sous ses pieds d’un grand navire et de son sillage immaculé sur l’indigo de la Grande Bleue avant la prise de terrain et l’atterrissage (avec encore cette vision des débris d’un avion abattu) aboutissement de cet exceptionnel voyage aérien resté gravé dans ma mémoire.

Récit de Bernard Mahaut Documents Internet